[Reportage news] En Ukraine, le repos des guerriers

Au-delà de la dimension physique du conflit, il y a un aspect dont les militaires ukrainiens ont très tôt pris conscience : celui du moral et de la santé mentale des troupes.

Grâce à Dmytro Kovalchuk, nous avons pu nous rendre dans un centre de réadaptation entièrement dédié à revivifier des soldats épuisés psychologiquement. Dans cet endroit tenu secret, les militaires passent trois jours à être à l’affût de ce que leur corps leur communique, à écouter leurs compagnons d’infortune chanter et jouer de la guitare, à bien manger, à jouer au tennis de table ou aux fléchettes. Trois petits jours non loin du front pour qu’ils puissent repartir, vite.

Daniier, le premier homme qui apparaît dans le sujet, nous disait qu’il était désormais impossible d’accorder 3 semaines de répit dans les Carpates, comme cela a pu être fait il y a quelques mois. Trop loin, trop long, trop bon, les hommes ne voulaient plus repartir au front. C’est ainsi.

“𝐿𝑒𝑠 ℎé𝑟𝑜𝑠 𝑠𝑜𝑛𝑡 𝑝𝑎𝑟𝑚𝑖 𝑛𝑜𝑢𝑠, 𝑖𝑙 𝑓𝑎𝑢𝑡 𝑙𝑒𝑠 𝑐𝑜𝑛𝑠𝑖𝑑é𝑟𝑒𝑟, 𝑖𝑙 𝑓𝑎𝑢𝑡 𝑡𝑟𝑎𝑣𝑎𝑖𝑙𝑙𝑒𝑟 𝑎𝑣𝑒𝑐 𝑒𝑢𝑥 𝑐𝑎𝑟 𝑙𝑎 𝑣𝑖𝑐𝑡𝑜𝑖𝑟𝑒 𝑐’𝑒𝑠𝑡 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝑙𝑎 𝑡ê𝑡𝑒. »

Marina, la psychologue, nous a parlé de l’après. L’après-guerre. L’après-front. L’après-tout. La nécessité de guérir. Vraiment guérir. Ne plus mettre de pansement sur une jambe de bois, comme elle le fait aujourd’hui, à regret.

“𝐿𝑒 𝑡𝑟𝑎𝑢𝑚𝑎𝑡𝑖𝑠𝑚𝑒 𝑟𝑒𝑣𝑖𝑒𝑛𝑡 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝑙𝑎 𝑛𝑢𝑖𝑡, 𝑖𝑙 𝑣𝑎 𝑟𝑒𝑣𝑖𝑣𝑟𝑒 𝑡𝑜𝑢𝑡 𝑐𝑒 𝑞𝑢’𝑖𝑙 𝑎 𝑡𝑟𝑎𝑣𝑒𝑟𝑠é 𝑣𝑖𝑎 𝑑𝑒𝑠 𝑓𝑙𝑎𝑠ℎ𝑏𝑎𝑐𝑘𝑠. 𝐴 𝑐𝑒 𝑚𝑜𝑚𝑒𝑛𝑡-𝑙à, 𝑛𝑜𝑛 𝑠𝑒𝑢𝑙𝑒𝑚𝑒𝑛𝑡 𝑖𝑙 𝑝𝑒𝑢𝑡 𝑠𝑒 𝑏𝑙𝑒𝑠𝑠𝑒𝑟 𝑙𝑢𝑖, 𝑚𝑎𝑖𝑠 𝑎𝑢𝑠𝑠𝑖 𝑠𝑎 𝑓𝑒𝑚𝑚𝑒 𝑜𝑢 𝑠𝑒𝑠 𝑒𝑛𝑓𝑎𝑛𝑡𝑠.”

“𝐽’𝑎𝑖 𝑑𝑒𝑠 𝑟é𝑐𝑖𝑡𝑠 𝑑𝑒 𝑔𝑒𝑛𝑠 𝑞𝑢𝑖 𝑠𝑜𝑛𝑡 𝑝𝑎𝑠𝑠é𝑠 𝑝𝑎𝑟 𝑙𝑎 𝑓𝑒𝑛ê𝑡𝑟𝑒, 𝑢𝑛𝑒 𝑎𝑚𝑖𝑒 𝑝𝑟𝑜𝑐ℎ𝑒 𝑞𝑢𝑖 𝑚’𝑎 𝑑𝑖𝑡 𝑎𝑣𝑜𝑖𝑟 é𝑡é é𝑡𝑟𝑎𝑛𝑔𝑙é𝑒 𝑝𝑎𝑟 𝑠𝑜𝑛 𝑝𝑎𝑟𝑡𝑒𝑛𝑎𝑖𝑟𝑒 à 𝑙𝑎 𝑓𝑎𝑣𝑒𝑢𝑟 𝑑’𝑢𝑛 𝑑𝑒 𝑐𝑒𝑠 𝑓𝑙𝑎𝑠ℎ𝑏𝑎𝑐𝑘𝑠. 𝑉𝑜𝑖𝑙à 𝑙’𝑢𝑛 𝑑𝑒𝑠 𝑒𝑥𝑒𝑚𝑝𝑙𝑒𝑠 à 𝑙𝑎 𝑓𝑜𝑖𝑠 𝑙𝑒𝑠 𝑝𝑙𝑢𝑠 𝑏𝑎𝑠𝑖𝑞𝑢𝑒𝑠 𝑒𝑡 𝑙𝑒𝑠 𝑝𝑙𝑢𝑠 𝑒𝑓𝑓𝑟𝑎𝑦𝑎𝑛𝑡𝑠 𝑑𝑒 𝑐𝑒 𝑞𝑢𝑒 𝑙𝑎 𝑔𝑢𝑒𝑟𝑟𝑒 𝑓𝑎𝑖𝑡 𝑎𝑢𝑥 𝑠𝑜𝑙𝑑𝑎𝑡𝑠.”

Et puis, bien sûr, il y a Andrii. Celui que vous voyez à la fin du reportage, les yeux mouillés. Celui dont on nous dit souvent qu’il a le même regard que tant de poilus sur les photos, ces soldats de la Première Guerre mondiale.
Andrii qui nous disait : “𝐼𝑐𝑖 𝑜𝑛 𝑐𝑜𝑚𝑚𝑒𝑛𝑐𝑒 à 𝑜𝑢𝑏𝑙𝑖𝑒𝑟, 𝑚𝑎𝑖𝑠 𝑑𝑒𝑚𝑎𝑖𝑛 𝑐𝑒 𝑠𝑒𝑟𝑎 𝑙𝑎 𝑚ê𝑚𝑒 𝑐ℎ𝑜𝑠𝑒.”
Andrii qui poursuivait : “𝑄𝑢𝑎𝑛𝑑 𝑐’𝑒𝑠𝑡 𝑐𝑎𝑙𝑚𝑒, 𝑞𝑢𝑒 ç𝑎 𝑛𝑒 𝑡𝑖𝑟𝑒 𝑝𝑎𝑠, 𝑡𝑢 𝑐𝑟𝑒𝑢𝑠𝑒𝑠. 𝑇𝑢 𝑣𝑎𝑠 𝑑𝑜𝑟𝑚𝑖𝑟 𝑑𝑎𝑛𝑠 𝑙’𝑎𝑏𝑟𝑖. 3 ℎ𝑒𝑢𝑟𝑒𝑠 𝑑𝑒 𝑠𝑜𝑚𝑚𝑒𝑖𝑙, 𝑒𝑛𝑠𝑢𝑖𝑡𝑒 𝑡𝑢 𝑟𝑒𝑡𝑜𝑢𝑟𝑛𝑒𝑠 𝑐𝑟𝑒𝑢𝑠𝑒𝑟. 𝑇𝑢 𝑑𝑜𝑖𝑠 𝑐𝑟𝑒𝑢𝑠𝑒𝑟. 𝑇𝑢 𝑐𝑟𝑒𝑢𝑠𝑒𝑠 𝑡𝑜𝑢𝑡 𝑙𝑒 𝑡𝑒𝑚𝑝𝑠.”
Andrii qui concluait, quand on lui demandait ce dont il rêvait le plus au monde : « 𝐿𝑎 𝑓𝑖𝑛 𝑑𝑒 𝑙𝑎 𝑔𝑢𝑒𝑟𝑟𝑒. »
Andrii qui n’a pas dit : « 𝑳𝒂 𝒗𝒊𝒄𝒕𝒐𝒊𝒓𝒆 ». Ca parait rien, là, comme ça, mais croyez-moi, ça change tout.

A l’image : Morgane Bona

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