SANTE PUBLIQUE – Les bébés sud africains représentent l’espoir d’un possible vaccin contre la tuberculose

C’est au Cap-occidental, à Worcester précisément (à 120 kilomètres du Cap), que chaque matin une dizaine de bébés reçoivent une piqûre, et ce par toute une équipe médicale dont la vie tourne autour de ce moment. Mais pas n’importe quelle piqûre : une qui contient le vaccin contre la tuberculose (TB) le « plus prometteur » en 90 ans.

(Crédits photos: cafepress.co.uk; photolibrary)

Le plus grand pas depuis 1921 à l’échelle internationale

La responsable du site SATVI (South African Tuberculosis Vaccine Initiative) de Worcester, Michele Tameris, nous explique : « il y a actuellement douze vaccins potentiels contre la TB testés dans le monde, mais l’essai clinique [mené en Afrique du Sud NDLR] est à son stade le plus avancé. […] C’est la première fois que l’on teste le vaccin hors du milieu médical : on veut savoir s’il protège bien les êtres humains [contre l’infection] ».

Ce vaccin prometteur aujourd’hui utilisé à Worcester, c’est celui développé par l’université d’Oxford (au Royaume-Uni) et connu sous le nom de MVA85A. Il est le plus avancé depuis 1921, lorsque deux docteurs français, Calmette et Guérin,  ont créé le seul vaccin TB utilisé aujourd’hui dans le monde : le BCG.

Pourquoi l’Afrique du Sud ?

La tuberculose, qui n’est rien de moins qu’une infection pulmonaire, a causé la mort d’1,7 million de personnes en 2009 dans le monde. L’Afrique du Sud a été choisie par les chercheurs car elle est gravement touchée par la maladie – qui, combinée au VIH, est un véritable fléau en matière de propagation – mais parce qu’elle dispose dans le même temps d’une bonne infrastructure médicale.

La « TB » prolifère en effet dans le pays à cause du virus du sida, qui affaiblit le système immunitaire de 5,7 des 48 millions d’habitants.« Plus de 300.000 séropositifs la contractent chaque année et plus de 110.000 en meurent « , selon l’OMS. Dans la région particulière de Worcester, qui correspond à la « route des vins », la maladie affecterait ainsi 1% de la population, un petit chiffre qui est pourtant inquiétant. 

2.784 bébés ont ainsi été faciles à trouver pour les chercheurs et leur essai, des nourrissons qui reçoivent une unique injection : soit celle du vaccin – celui d’Oxford – soit d’un placébo. Les deux produits sont conservés à moins 40°C. Les premiers nourrissons ont été piqués en juillet 2009 et les derniers le seront fin avril de cette année. Il faudra ensuite attendre deux années pour conclure à l’efficacité ou non du sérum. Si celui-ci s’avère plus efficace que le BCG – ce que les chercheurs laissent penser – il sera alors utilisé pour renforcer l’action du premier vaccin.

Une attente mondiale

S’il n’y a aucun mauvais retour une fois les deux ans passés et quelques tests supplémentaires effectués, le vaccin entrera alors en phase III, qui est la dernière avant la mise sur le marché (ce qui implique 20.000 volontaires sur plusieurs sites). Si le vaccin est grandement attendu, l’OMS rappelle que même dans le meilleur des cas le produit ne sera disponible qu’en 2018. Selon l’ONG, neuf millions de nouveaux cas de TB seraient diagnostiqués dans le monde chaque année, avec une prédominance soit dans les quartiers pauvres des pays les plus développées, soit dans les pays pauvres : 85% des cas de tuberculose en Asie et Afrique combinées. Même en occident, la maladie effectue un retour en force depuis quelques années – comme à Londres où, depuis 1999, la hausse des cas de tuberculose est de 50%.

L’attente est donc internationale. Si la maladie est curable au moyen de médicaments peu chers – au regard du prix moyen des traitements contre les infections en tout genre – le traitement, lui, dure longtemps et la plupart des malades l’abandonnent dès qu’ils sentent une amélioration, même légère. Ce comportement favorise l’émergence de tuberculoses résistantes aux nouveaux médicaments. Le vaccin représente ainsi une attente dans de nombreux domaines. 

Pour Michele Tameris, une ombre au tableau persiste : « ça reste une maladie de pauvres », ce qui explique l’absence de nouveau vaccin en près de cent ans selon elle. « Développer un vaccin ne peut être fait que dans un pays développé car cela coûte excessivement cher ». Le regard que porte la communauté scientifique sur la Tuberculose aujourd’hui, à l’heure d’un nouveau progrès, sera-t-il alors assez fort et persistent pour que l’expérience soit menée à son terme ? Rien n’est moins sûr.

Mélina Huet – (http://www.lepetitjournal.com/johannesbourg.html) – Mercredi 30 mars 2011

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