Ainsi parlait Shakespeare, et maints étudiants le déploraient à la sortie de la conférence donnée à Sciences Po Aix ce soir[1] : « Beaucoup de bruit pour rien » (Much adoe about Nothing). Depuis quelques jours, la venue de Marine le Pen, invitée par les étudiants du Cercle Politique Aixois (CPX)[2], échauffait les esprits.
Tout ça pour ça
Après six jours de polémique intense, durant lesquels l’IEP d’Aix-en-Provence semble s’être divisé en deux clans, c’est la déception qui s’affiche sur les visages. « Tout ça pour ça », pouvait-on entendre à plusieurs reprises, à peine une heure après une série de questions-réponses entre la présidente du Front National et les élèves de l’école.
Attendue au tournant sur des sujets économiques, mais aussi de laïcité et d’identité(s), la fille Le Pen a sans surprise joué la dédiabolisation, usant de son verbe avec dextérité pour contourner certaines questions épineuses, voire décrédibiliser ses interlocuteurs. Parmi les joutes verbales, l’on retiendra par exemple l’ironique « Mais vous devriez arrêter la politique et faire du journalisme, vous êtes très bon à ce petit jeu » suivie de « après Bourdin voici Apatie ! », rebaptisant deux modérateurs du CPX, sous les rires de la salle.
« L’économie, ce n’est pas un saucisson »
Celle qui fascine à peu près autant qu’elle révolte a profité de la vague de ricanements pour poursuivre dans sa lancée, en justifiant certaines de ses réponses par des expressions soignées sur la forme, oubliant le plus souvent le fond. Et à ceux qui s’insurgent du manque de profondeur des échanges, le service de sécurité, jouant temporairement le rôle de RP, répond que « Marine a un avion à prendre ». Ha. Si Marine a un avion à prendre alors…
Mélina Huet
Morceaux choisis
« Je ne peux pas répondre en deux minutes sur des questions comme le chômage ; je ne suis pas Merlin l’enchanteur » (à propos des réponses trop longues)
« L’économie, ce n’est pas un saucisson ! » (accusant le CPX de ne prendre que des parties isolées de son programme pour la campagne présidentielle 2012)
« CPX – Nous allons aborder les questions de nationalité, d’identité et de laïcité
(brouhaha général)
MLP – On a l’impression que c’est des sujets de transgression (elle rit)
CPX – Avec vous on ne sait jamais
« Excusez-moi, je n’arrive pas à lire, ouais parce que je suis myope en plus » (en réponse aux pancartes des étudiants « Je ne suis pas d’accord avec vous »)
« Si cela signifie être à l’écoute de l’aspiration du peuple, cette accusation ne me dérange pas ». (en réponse aux accusations de populisme)
« Je suis confiante » (au sujet du recours au Conseil Constitutionnel, déposé en juin dernier, afin d’annuler l’élection de Philippe Kemel à Hénin-Beaumont, dans le cadre des élections législatives)
« Non pas du tout » (en réponse à la question : « vous considérez-vous comme laïcarde ? »)
« Le mariage d’un homme et d’une femme, c’est notre civilisation » (au sujet du mariage pour tous)
« Le peuple français n’est pas un bœuf » (évoquant l’impossibilité [incompatibilité avec les traités internationaux] pour les Français de revenir sur l’abolition de la peine de mort, impossibilité vue par l’intéressée comme un déficit de démocratie en France)
PHOTOS: Mélina Huet (tous droits réservés)
